Comment évaluer une caractéristique latérale ?


La plupart des paramètres d'état de surface sont liés aux hauteurs. Mais pour certaines applications, les structures latérales et leur espacement doivent être caractérisées. Quels paramètres peuvent être utilisés et comment fonctionnent-ils ?



Les paramètres de rugosité classiques comme Ra, Rq, Rsk (et leurs équivalents surfaciques Sa, Sq, Ssk) sont basés sur l'intégration de hauteurs calculées à partir d'une référence. Même les paramètres basés sur le taux de portance comme Rmr, Rdc, Rk (ou Smr, Sdc, Sk) sont basés sur la courbe d'Abbott-Firestone, elle-même construite à partir de la distribution des hauteurs ou des profondeurs. De plus, tous ces paramètres prennent en compte l'ensemble des points du profil (ou de la surface) ; ce sont des paramètres de champ. Ils ne donnent aucune information latérale, comme la position, ni ne permettent de caractériser une région d'intérêt de la surface.

Les seules informations latérales utilisées dans une analyse de rugosité sont les cut-off de filtrage :

  • Soit le cut-off λs de microrugosité ou le cut-off principal λc utilisé pour séparer l'ondulation et la rugosité du profil
  • ou leurs équivalents surfaciques, le filtre S et/ou le filtre L utilisés pour créer les surfaces à bande limitées.

Pourtant certaines fonctions sur des pièces manufacturées reposent sur la taille et l'espacement de structures ou d'éléments saillants ou sur l'absence de périodicité sur la surface. Par exemple, la surface grainée d'un boîtier d'ordinateur portable contribue à son aspect et à la qualité du toucher. La qualité perçue dépend certes de la hauteur moyenne des grains, mais aussi, et probablement plus encore de leur distribution latérale dans le plan (leur séparation relative) ou de leur taille latérale (diamètre ou dimension).

D'un autre côté, dans le cas d'un axe en rotation à haute vitesse, la variation périodique de hauteur peut être plus ou moins génante ou sonore, selon la fréquence du bruit généré, qui dépend donc de l'espacement latéral des saillies. Certaines fréquences peuvent même être destructrices pour la surface et provoquer des pannes.

1. Largeur d'éléments

Pour l'analyse des profils, seul un très petit nombre de paramètres sont conçus pour caractériser le latéral.

L'un des plus connus est RSm, la largeur moyenne des éléments, défini dans l'ISO 4287. Un élément est défini sur un profil comme un pic suivi d'une vallée, ou d'une vallée suivie d'un pic. Ces pics et vallées étant définis par rapport à la ligne moyenne qui définit le zéro.

Afin d'éviter de prendre en compte de petits pics ou de petites vallées qui relèvent plutôt du bruit, des discriminations, verticale et horizontale, sont utilisées. Par exemple, le deuxième élément montré ici comptera un seul pic en fusionnant les deux petits pics car la vallée ne descend pas en-dessous du seuil vertical sous la ligne moyenne.

En calculant la moyenne de toutes les largeurs d'éléments, on peut estimer la périodicité d'une structure. Cela peut également être utile pour des profils semi-périodiques où la dispersion des largeurs d'éléments est réduite par la moyenne. Ce paramètre est donc utile pour spécifier une tolérance sur la largeur de structures périodiques sur la surface.

Mais la définition initiale du paramètre RSm est quelque peu ambigüe car elle est définie sur une longueur de base. De plus, l'usage des discriminations n'est pas clairement défini et porte à des interprétations différentes selon les constructeurs, qui ont implémenté des algorithmes différents. Ceci conduit à des écarts importants dans les valeurs, surtout sur des profils semi-périodiques ou quelconques. Cette situation est corrigée avec la norme ISO 21920 à paraître.

RSm est exprimé en unité de longueur en X, souvent en millimètres. RSm peut être utilisé pour évaluer la périodicité d'une structure. En particulier, il est utilisé pour étalonner le coefficient d'amplification latéral sur des profilomètres à balayage, à l'aide d'un étalon périodique de type rectagulaire, triangulaire ou sinusoïdal (comme les étalons modèles 521 or 525 de chez Rubert & Co).



2. Largeurs de motifs

Les motifs R&W définis dans l'ISO 12085, souvent appelés French motifs à l'étranger, sont très utiles pour caractériser le latéral. La beauté de cette méthode est qu'elle décompose le profil en motifs qui sont des triplets pic-creux-pic, avec deux motifs adjacents partageant un pic.

Après une passe de recombinaison des motifs non-significatifs, les motifs résultants sont caractérisés avec des paramètres comme R, hauteur moyenne des motifs, ou AR, largeur moyenne des motifs. Ce dernier paramètre est similaire au RSm et doit donner la même valeur sur des profils périodiques. Un paramètre complémentaire intéressant est le SAR qui est l'écart-type sur la largeur des motifs. Il renseigne sur la représentativité de la moyenne, selon qu'on a un profil périodique, semi-périodique ou quelconque.

Les motifs calculés sur le profil d'ondulation, issu de l'enveloppe supérieure, permettente de calculer les paramètres W, AW et SAW.

3. Analyse spectrale

Les structures périodiques sont souvent évaluées à l'aide d'une analyse de Fourier. Une période particulière apparaîtra sous la forme d'une raie spectrale sortant du bruit environnant. Cette analyse peut être conduite dans le logiciel Mountains® par exemple avec l'étude DSP (Densité spectrale de puissance).

4. Qu'en est-il des caractéristiques latérales sur une surface ?

La plupart des surfaces structurées ou texturées ne peuvent pas être analysées de façon fiable avec des profils et demandent des mesures surfaciques. Curieusement, les seuls paramètres latéraux définis dans l'ISO 25178-2 sont le Sal et le Str. Le paramètre d'isotropie Str permet de savoir si la surface est homogène ou présente des directionalités privilégiées.

Une surface structurée aura un Str faible alors qu'une surface homogène aura un Str proche de 1 (ou 100%). Le paramètre Sal est appelé longueur d'autocorrelation et est sensé donner la taille moyenne d'une cellule élémentaire de la texture. Cependant, ce paramètre est peu compris et peu utilisé si bien qu'il est peu ou pas étayé par des études scientifiques.

5. Paramètres de motifs surfaciques

Les paramètres de motifs sur une surface sont calculés sur des éléments identifiés (points, lignes, aires) grâce à une segmentation définie dans l'ISO 25178-2 et l'ISO 16610-85. Les collines (hills) et les vallées (dales) sont les équivalents surfaciques des motifs, i.e. une portion entourée d'un contour qui représente une cellule de texture identifiable sur la surface. Ce motif peut aussi être une structure géométrique si on utilise un filtre gradient avant la segmentation.

Les deux exemples ci-dessus montrent des cellules de texture (à gauche) ou des structures (à droite) détectées par l'algorithme des bassins versants (Watersheds). Les caractéristiques des motifs peuvent être évaluées individuellement ou globalement sous forme de moyennes. Plusieurs paramètres permettent de quantifier les aires ou les diamètres. La norme ISO spécifie l'aire des collines Sha (area of hills), l'aire des vallées Sda (area of dales) et d'autres paramètres peuvent évaluer la forme du motif dans le plan, comme le diamètre équivalent, les diamètres min/max/moyen ou le facteur de forme. Ces paramètres sont tous fournis dans le module Particle Analysis de Mountains®.

6. Conclusions

Les normes ISO offrent de nombreux paramètres basés sur les hauteurs, le taux de portance ou les pentes, mais très peu pour caractériser des structures latérales. Il y a là de la place pour des progrès futurs afin d'offrir aux métrologues et aux designers des outils plus adaptés aux spécifications de pièces manufacturées. La segmentation permet l'analyse d'éléments individuels, notamment dans le plan X-Y, à partir de leurs contours. De nombreux paramètres de forme peuvent être calculés ou même des paramètres de distance mutuelle comme le pitch.


Ressources


ISO 4287:1996: GPS – Méthode du profil - Termes, définitions et paramètres d'états de surface

ISO/CD 21920: GPS – Etat de surface: Méthode du profil – Définitions et paramètres

ISO 12179:2000: GPS – Etat de surface: Méthode du profil - Etalonnage des profilomètres à contact

ISO 25178-700:2010: GPS – Etat de surface: Surfacique - Etalonnage et étalons

ISO 16610-85:2013: GPS – Filtrage – Filtre surfaciques morphologiques – Segmentation

F BLATEYRON, Feature parameters, chapitre 3 dans Characterisation of areal surface texture, publié chez Springer

N SENIN, L BLUNT, Characterisation of individual areal features, chapitre 8 dans Characterization of Areal Surface Texture, publié chez Springer

J BLANC et al, Surface characterization based upon significant topographic features, J of Physics, conf series

Rubert & co material measures