La profilométrie est née dans les années 1940, poussée par l'urgence d'améliorer la qualité et l'efficacité des composants mécaniques utilisé dans l'armement, les avions, les véhicules et les bateaux durant la second guerre mondiale. La discipline a été fondée par des mécaniciens pour les besoins des mécaniciens. Après la guerre, la discipline s'est développée et enrichie pour accompagner la croissance de l'industrie automobile et plus tard d'autres industries comme les composants électroniques, les implants médicaux ou l'électroménager.
La nature de l'état de surface est basée sur la longueur d'onde latérale des irrégularités de la surface. La forme géométrique et les écarts de forme sont exclus de l'état de surface, laissant donc trois composants : le profil primaire, le profil de rugosité et le profil d'ondulation, chacun obtenu par l'application de filtres. La rugosité est de loin la caractéristique la plus contrôlée car ayant le plus d'impact sur les fonctions mécaniques recherchées comme la résistance à l'usure ou aux frottements. L'ondulation impacte les fonctions d'étanchéité ou de glissement.
Les spécifications d'état de surface s'expriment par des paramètres qui impliquent des conditions de filtrage de par leur nom. Par exemple, le paramètre de "hauteur quadratique moyenne" correspond à Rq quand il est calculé sur le profil de rugosité, à Wq sur le profil d'ondulation et à Pq sur le profil primaire. La définition de ces trois paramètres est la même mais le profil considéré est filtré différemment. Du coup, les treize paramètres de l'ISO 4287:1996 deviennent en fait trente-neuf paramètres !
Mais ce n'est pas tout. Certains paramètres sont calculés sur de petites portions appelées longueurs de base puis moyennés, et d'autres sont calculés sur la longueur d'évaluation. Il est intéressant de noter que cette complexité a été supprimée par les américains dans la norme ASME B46.1 qui est plus orientée pratique que les normes ISO bien qu'un peu moins rigoureuse. Voir la page sur paramètres de profil, pour plus de détails.
Il y a bien des raisons historiques à cette complexité, l'une étant que dans les années 1980, la dispersion des résultats entre profilomètres différents nécessitait une méthode de stabilisation par la moyenne.
Aujourd'hui, ce besoin n'est plus tellement d'actualité grâce à l'amélioration des techniques instrumentales. D'ailleurs, la nouvelle norme ISO 21920 supprime le calcul moyenné sur des longueurs de base pour la plupart des paramètres.
Le développement des états de surface surfaciques a débuté dans les années 1990 par une simple extrapolation des paramètres de profils à la troisième dimension. Puis le projet européen Surfstand a jeté les bases de la future norme et a établi qu'une analyse surfacique permettait une meilleure stabilité et de meilleures corrélations fonctionnelles que la profilométrie. Après une période où ces paramètres furent nommés sRa, sWa et sPa, il fut finalement décidé de n'avoir qu'un seul symbole (Sa) indépendamment des conditions de filtrage. Voir la page sur l'analyse surfacique, pour plus de détails.
Une des raisons de ce choix est que sur une surface rectangulaire, il est possible d'avoir un état de surface de type rugosité dans une direction, et de type ondulation dans la direction perpendiculaire. De plus, les nouvelles méthodes d'analyse, telles que l'exploration multi-échelle ou les filtres morphologiques, génèrent des surfaces qui ne sont ni de l'ondulation ni de la rugosité.
La norme ISO 25178 a été développée avec l'idée que "la nature est tridimensionelle" et que les nouveaux concepts introduis devaient préparer la norme du nouveau millénaire. Un fondement mathématique amélioré et des concepts plus simples ont été utilisés avec l'intention de les utiliser aussi pour les profils lorsque les normes actuelles viendraient en révision.
La révision des normes profilométriques a maintenant démarré avec le projet de norme ISO 21920 parties 1 à 3.
Pourquoi ne pas saisir cette opportunité pour moderniser notre portefeuilles de normes ? Pourquoi ne pas reprendre les bases de la norme surfacique et éliminer les complexités des anciennes normes ? Le débat fait rage dans le comité ISO en charge de ce sujet mais les vieilles habitudes sont bien ancrées dans certaines industries...
Pourtant, les surfaces d'aujourd'hui sont plus complexes qu'avant. Elles sont souvent structurées ou stratifiées afin de programmer une fonction sur la surface. Les surfaces hydrophobiques ont des micropiliers, l'impression de nanostructures périodiques permet d'obtenir une couleur particulière sans utiliser d'encre ou de peinture, kes surfaces structurées au laser permettent d'optimiser les frottements et économiser de l'énergie dans les moteurs, etc.
Ces surfaces requièrent de nouveaux outils tels que la segmentation, les ondelettes biorthogonales, le filtrage passe-bande, l'analyse géométrique multi-échelle ou l'autocorrélation. Différents profils ou surfaces peuvent être obtenus par différents filtrages (Voir la série de normes ISO 16610), chacun ayant un avantage dans une application spécifique.
La dualité rugosité/ondulation n'est plus valide de nos jours pour les surfaces complexe, mais reste pertinent sur les surfaces isotropes obtenues par les procédés traditionnels d'usinage.
Imaginons que l'on définisse une notation unique pour les états de surface, indépendante des conditions de mesure, de suppression de forme ou de filtrage. Imaginons que l'on appelle ces paramètres Sx avec S symbolisant la surface et un indice x pour préciser le type du paramètre. Par exemple :
On peut imaginer utiliser la même définition pour les profils de circularité, les cylindres, les surfaces en maillage triangulaire (freeform) les profils de contour paramétriques, etc. Cela éviterait la multiplication des noms de paramètres selon le type de donnée.
Evidemment, l'association de la forme (redressement, suppression de forme) et les conditions de filtrage (bande passante ou limitation en échelles) devront être indiquées explicitement dans la spécification ou dans un encadré référencé dans la spécification. Mais ceci serait plus clair que de se reposer sur des valeurs par défaut que la majorité des utilisateurs ignorent ou ne comprennent pas.
Les dessins techniques existants référençant les anciens paramètres pourraient toujours être utilsés. Ils se rapportent aux anciennes normes. Mais les nouvelles normes pourraient utiliser de nouveaux symboles, plus simples et plus flexibles, adaptés aux exigences modernes des nouvelles techniques de production et d'usinage, et par celles encore à venir.
La simplification des normes est un sujet d'actualité au sein de l'ISO TC213/WG16. Les utilisateurs sont invités à contribuer à ces discussions en remontant leur point de vue et leurs contraintes afin que les futures décisions ne soient pas seulement prises par les prescripteurs de la mécanique et de l'automobile (Les normes ISO sont aussi utilisées dans plein d'autres domaines).
En tant que membre actif de ce groupe de travail, j'aimerais entendre l'avis d'utilisateurs de domaines différents qui utilisent les profils et les surfaces et qui se confrontent régulièrement à cette complexité. Enseignants, métrologues, ingénieurs et chercheurs, envoyez vos témoignages !
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