La forme nominale est la forme géométrique voulue par le concepteur de la pièce mécanique. C’est en général une forme plane ou de révolution (cylindre, cône, sphère). La spécification des états de surface ne se faisant que sur la surface remise à plat, indépendamment de la forme réelle de la pièce, le métrologue devra donc effectuer un redressement ou une suppression de forme avant de procéder au calcul des paramètres d’états de surface. L’opération consiste à modéliser une forme et à l’associer aux points mesurés pour ensuite soustraire la forme et obtenir la surface à plat.
Dans le cas d’un échantillon non manufacturé, on ne parle pas de forme nominale mais il peut être utile de supprimer la forme naturelle par un polynôme ou par filtrage.
Les paramètres d’états de surface dépendent tous d’une référence (ligne moyenne ou plan moyen) utilisée dans la détection des pics et creux ou dans le calcul des moyennes ou des moments. La suppression de forme ou le redressement permettent de définir cette référence.
Ci-dessus : profil mesuré sur une sphère et en-dessous le profil après suppression du cercle des moindres carrés (rayon calculé : 9,53 mm)
Sur un profilomètre 2D, l’axe de déplacement du stylet selon X constitue la référence déterminant le zéro des hauteurs. Cette référence est en général assurée par un barreau en acier rectifié de grande précision sur lequel glissent des patins entraînant le capteur avec le stylet. Tout écart de rectitude sur cette référence se traduit par une déviation dans les hauteurs mesurées sur la pièce. Certains instruments effectuent un étalonnage en mesurant un plan de verre étalon et en mémorisant les écarts à grande longueur d’onde afin de compenser ces écarts à chaque mesure. Sur le profil ou la surface, une fois la forme nominale supprimée, on peut analyser les écarts de forme, l’ondulation et la rugosité.
Schéma d’un profilomètre 2D à contact et système de coordonnées de l’instrument
Avec un profilomètre 3D optique, la référence dépend de la technologie de mesure. Quand il existe, le système de balayage vertical influence la référence selon Z par son alignement et sa linéarité. Le miroir de référence d’un interféromètre également. Ces perturbations sont le plus souvent cartographiées lors de l’étalonnage en usine ou par l’utilisateur. Voir notamment ISO 25178-700.
Les profilomètres d’atelier qui ne possèdent pas de référence interne utilisent un patin glissant qui va éliminer la forme générale – et souvent aussi une partie de l’ondulation – afin de permettre au capteur de n’enregistrer que les variations liées à la rugosité.
Deux exemples de patins pour profilomètre d’atelier
Les profilomètres équipés de palpeurs à patin ne peuvent évaluer l’ondulation à moins d'être équippés d'un patin spécial large ; ils sont donc en général cantonnés aux paramètres de rugosité.
Le métrologue est incité à aligner le mieux possible son échantillon avec l’axe de mesure. Par exemple, sur un profilomètre à contact, l’échantillon est placé le plus horizontalement possible, aligné sur l’axe X de déplacement qui est lui-même aligné sur la référence interne de l’appareil. C’est une garantie que les hauteurs sont bien enregistrées sur l’axe Z de l’instrument à peu près aligné sur l’axe Z de l’échantillon. Le redressement ne sert alors qu’à affiner l’alignement en corrigeant les fractions de degré de pente résiduelle.
Pour une mesure de surface, par exemple avec un microscope confocal, on maintiendra l’échantillon bien horizontal afin que l’axe de balayage vertical soit bien perpendiculaire au plan de l’échantillon.
Les corrections effectuées par le logiciel seront d’autant plus efficaces et précises que l’échantillon est correctement positionné sur l’instrument avant la mesure.
Sur un profil, la ligne moyenne du profil primaire est déterminée par le redressement ou la suppression de forme, et donc dépend de l’opération d’association. Par défaut, la droite des moindres carrés associée avec le profil devient la référence horizontale du profil primaire, définissant ainsi le zéro sur l’axe des hauteurs.
De même sur une surface, le plan moyen est déterminé par l’opération de suppression de forme. Les structures locales ou la forme géométrique de l’échantillon peuvent donc influencer cette référence en faisant dévier le plan associé.
L’association est une opération permettant de configurer un modèle mathématique afin qu’il approxime au mieux une pièce réelle, souvent représentée par un nuage de points. Les modèles sont des formes géométriques (une droite, un plan, une portion de sphère, de cylindre, de cône, un polynôme, etc.).
Les méthodes d’association utilisées dans la mesure des états de surface sont :
Les moindres carrés correspondent à la norme L2 car il s’agit de minimiser les écarts quadratiques. Le minimum zone correspond à la norme L∞ appelée aussi Chebychev. On utilise aussi parfois une norme L1 qui correspond à la minimisation de la valeur absolue des écarts ou au calcul de la moyenne simple.
Les contraintes sur l’association peuvent être de fixer le rayon de la sphère et laisser calculer les coordonnées du centre, ou bien de positionner le plan des moindres carrés en extérieur matière, c’est-à-dire translaté en contact avec le point le plus haut de la surface.
Les symboles utilisés pour les formes associées par les moindres carrés sont LSLI (pour une ligne) ou LSPL (pour un plan).
La méthode Minimum Zone enserre le profil avec deux droites parallèles, ou la surface avec deux plans parallèles, et cherche à trouver l’orientation permettant de minimiser la distance entre les deux droites (ou les deux plans). Les symboles pour les formes associées en Minimum Zone sont MZLI et MZPL.
La pente d’un profil ou d’une surface est en général très faible, de quelques degrés à peine, et il est coutume de se contenter d’une soustraction des hauteurs entre le profil et la droite calculée. Mais si l’inclinaison de la surface est plus importante, alors la soustraction introduit un biais significatif voire déforme complètement l’échantillon.
Soustraction de la droite de référence selon l'axe Z.
Profil redressé. La forme du profil est déformée par la soustraction
à cause de la forte pente.
Dans le cas d’une inclinaison importante, il faut alors basculer vers une rotation qui ramène le fichier mesuré à l’horizontale. Cela correspond à effectuer une soustraction selon la normale à la forme nominale. La forme du profil n’est pas altérée mais la répartition des points n’est plus équidistante, ce qui nécessite souvent une opération de ré-échantillonnage, qui elle-même introduit un lissage des plus hautes fréquences (bruit). Dans certains cas, des surplombs apparaissent et sont éliminés par le ré-échantillonnage, ou alors nécessite de rester sur un profil paramétrique de type (x, y) = f(t).
Soustraction de la droite de référence selon la normale à la droite de référence.
Profil redressé. La forme est respectée mais les points sont irrégulièrement espacés.
La méthode par défaut pour les états de surface est la méthode des moindres carrés. C’est la méthode privilégiée pour des états de surface de type aléatoire (stochastique), sans structure ou forme géométrique. Cependant en présence de motifs périodiques ou de structure géométrique, les moindres carrés sont perturbés par la disparité de répartition des hauteurs.
Ci-dessus, la droite des moindres carrés est influencée par la forme du profil – profil du haut à cause de la rainure – profil du bas à cause de la répartition des hauteurs du profil, positives à gauche et négatives à droite. Dans ces cas, le redressement devrait plutôt se faire par le Minimum Zone afin d’obtenir correctement la direction principale du profil. Sur le profil du haut, on aurait pu aussi exclure la zone de la rainure du calcul de la droite des moindres carrés.
L’exclusion de structure est une opération manuelle ou automatique permettant de ne pas prendre en compte tous les points du profil ou de la surface dans le calcul de la forme nominale associée.
Dans le cas de cette surface, la rainure décentrée provoque un biais sur le calcul du plan des moindres carrés, empêchant un redressement correct de la surface.
La solution consiste à exclure la rainure du calcul en l’entourant manuellement à l’aide d’un outil de sélection dans le dialogue de l’opérateur de redressement (ou de suppression de forme) et de l’exclure des calculs. La zone exclue est marquée en gris.
Dans d’autres cas, on peut exclure automatiquement les structures.
Cette surface de DVD mesurée à l’AFM comporte de nombreuses structures qu’il serait difficile d’exclure manuellement. Chaque cellule influence le plan des moindres carrés par sa hauteur plus faible que le plan supérieur, et par leur répartition non homogène sur la surface.
L’option d’exclusion automatique peut être configurée pour exclure les structure située d’un côté ou de l’autre du plan moyen, ou des deux côtés.
Les structures sont exclues et le plan des moindres carrés est ici calculé correctement sur la zone plane.
Dans certaines applications non mécaniques, par exemple, la mesure de surfaces biologiques ou la mesure de surfaces de fossiles, il est nécessaire de définir une référence plane à partir d’un échantillon qui présente une forme complexe. Il est possible d’approximer cette surface par un polynôme, éventuellement en excluant certaines zones (ci-dessous une plaie mesurée sur la peau d’un patient ; la forme est celle de la jambe. Supprimer cette forme permet d'évaluer le volume avec une référence à plat.).
Dans le cas général, il faut utiliser les polynômes avec précaution car ceux-ci ont tendance à diverger sur les bords dans le cas de degrés élevés.
Certains instruments à balayage latéral comme les profilomètres à balayage ou les AFM sont parfois affectés par un décalage de la référence moyenne entre les lignes mesurées. Dans le cas d'un profilomètre, c'est dû au défaut de rectitude de l'axe Y. Dans le cas d'un microscopes à champ proche, l’exploitation des mesures ne peut se faire sans avoir corrigé ce problème de décalage abrupt d'une ligne à l'autre. La solution consiste à redresser chaque ligne indépendamment afin de les recaler sur la même base plane. Il est nécessaire ici aussi d’exclure les structures pouvant altérer le calcul de la ligne moyenne.
Mesure AFM montrant un décalage de la référence verticale à deux endroits.
La surface corrigée ligne à ligne permet de voir le relief correctement.
Une surface comportant plusieurs plans à hauteurs différentes peut être redressée à l’aide de l’opérateur de redressement-partition qui segmente les structures de la surface par la méthode des bassins versants.
Ci-dessus : l’image de droite montre la surface segmentée qui permet à l’utilisateur de sélectionner une ou plusieurs plages qui seront utilisées pour le redressement de la surface entière.
Un cas encore plus difficile à traiter est lorsque plusieurs plans à différentes hauteur sont affectés d’une courbure que l’on souhaite supprimer, par exemple pour pouvoir ensuite évaluer l’écart en hauteur entre chaque plan. Il est nécessaire alors d’utiliser une fonction spéciale, le redressement multi-plan, dont l’algorithme évaluera la déformation générale en ignorant les transitions entre plans et leur hauteur respective.
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